Charlie & Alexander
le temps de respirer

Ça l'avait submergé comme un raz de marée. Il se souvient comme si c'était hier, le moment où il avait attendu, devant la navette, que sa sœur arrive. Il l'avait d'abord fait par simple devoir, il était son grand frère après tout et il avait la possibilité de lui éviter une mort atroce en restant sur Terre. Elle n'était pas venue. Elle était resté derrière. Par loyauté ou par stupidité, pour Alexander à cet instant, les deux notions avaient du mal à se séparer. Son cœur s'était légèrement pincé mais des sentiments contradictoires avaient eu finit de ce moment de faiblesse : elle n'était qu'une emmerdeuse. Elle était mieux où elle était et si elle ne pouvait pas oublier ses caprices de gamine deux secondes pour survivre, alors elle ne méritait pas de vivre. En quelques instants, sa peine avait disparu et il se sentit presque bien. Si toutes les peines se terminaient comme ça, alors il était heureux... Enfin, c'est ce qu'il croyait. Peu après avoir prit son poste de conseiller, une nuit, il se réveilla, une douleur à la poitrine, la gorge serrée, le souffle court. Il cru d'abord à une crise cardiaque. Le sale coup, juste après les élections. Il rampa jusqu'à la salle de bain et se versa de l'eau glacée sur le visage. Il vomit le peu qu'il avait mangé le soir même et resta assit sur le sol de la petite salle de bain. Cette douleur, il la reconnaissait en fait. C'était il y a bien quelques années qu'elle n'était pas venue. Lorsque son ex-femme l'avait quitté peut être... Ou alors qu'il avait été à l'enterrement de ses parents. Ou quand Lucas avait eu un accident... De la tristesse ? De la détresse ? En quelques secondes, le cocktail de pensées et de sentiments qu'il avait ressenti ces jours-là lui revinrent dans la gueule comme un coup de poing en métal. Il pleura à chaudes larmes pendant deux heures, hoquetant comme un gosse et sentant les larmes couler le long de son cou.

Il se réveilla, toujours sur le sol de la cuisine. Quelqu'un toquait à la porte. Alexander se redressa, se leva et se construisant une nouvelle contenance, alla ouvrir sa porte. Un de ses assistants se tenait là, un peu étonné de voir le conseiller. « Quoi ? » Le jeune homme farfouilla dans des notes « Vous m'avez demandé, il y a quelques temps de chercher Elizabeth Kaneda. Je l'ai trouvé, elle est dans le Centaurus. On m'a dit de demander à l'équipe de recherche, l'étage au dessus de la clinique. » Le conseiller hocha la tête. « Quelle heure il-est ? » L'assistant paru gêné « Il est 10h du matin monsieur... » Alexander referma la porte brutalement. Son insomnie pathétique de la nuit dernière l'avait fatigué plus que de raison et il avait les jambes lourdes. Il revêtit un costume et annonça qu'il se rendait sur le Centaurus pour des affaires personnelles. Il fallait qu'il trouve Elizabeth, qu'il lui annonce la terrible nouvelle à propos de leur sœur et aussi qu'il lui demande si elle savait que Charlotte avait prévu par avance de faire quelque chose d'aussi stupide. Comme toujours. Il prit une navette et atterri sur le Centaurus. On lui fit des courbettes et on l'escorta jusqu'à l'étage de recherche. Il demanda ensuite à ce qu'on lui amène Elizabeth. Réclamant un peu d'intimité, il fut escorté dans une espèce de bureau vide où il fut laissé seul. Ce cabinet ressemblait plus à un laboratoire qu'à un bureau. Et d'ailleurs, il n'y avait rien dedans, qu'une table et quelques chaises entreposées là.

Alexander s'assit et sentit soudainement ses jambes légèrement lourdes. Ses angoisses de la nuit semblaient revenir doucement dans le fond de son ventre. Qu'est ce qu'il commencerait à lui dire ? Qu'elle était morte, qu'il avait essayé de la sauver ? Mais avait-il vraiment essayé, finalement ? Au lieu de rester planté comme un débile devant la navette, pourquoi n'avait-il pas essayé d'aller la voir à son appartement ? Pourquoi n'avait-il pas essayé de chopper son numéro de téléphone et appelé sans cesse ? Non... Il commençait à paniquer, il ne savait pas quoi dire, comment commencer, comment la regarder... Alexander se leva brusquement, ses jambes sur le point de le faire détaler lorsque la porte s'ouvrit. « Désolé. Je ne sais pas comment te le dire. » Furent les mots affolés qui sortirent de sa bouche. Le politicien avait du mal à lever les yeux pour voir le visage de sa sœur. L'homme se contenait, avait juste l'air un peu agité et nerveux mais les sanglots restaient bien dans sa gorge, dans le fond. Son ventre se tordait. Il n'avait qu'une envie : que toute cette conversation se termine rapidement.

Charlie & Alexander
le temps de respirer

Ces dernières semaines avaient été éprouvantes. Depuis qu'elle avait embarqué sur le Taurus, depuis qu'ils avaient quitté la Terre, tout était différent. Charlie avait embarqué sous l'identité de sa soeur, essayant de se faire passer pour elle, évitant le contact avec d'anciens éventuels collègues. Heureusement, elle n'avait croisé personne qui ne connaissait réellement sa soeur, et elle avait réussit à garder les apparences. Cela n'avait pas été facile, elles avaient beau être jumelles, elles étaient fausses jumelles et bien qu'elles se ressemblaient beaucoup on pouvait les distinguer. Heureusement, pour beaucoup de causasiens, elle était une asiat', vaguement typée japonaise et ça s'arrêtait là, ils n'auraient pas été capable de la reconnaître si elle avait été avec d'autres asiatiques à n'en point douter. Heureusement, les révoltes avaient éclatées, et elle y avait vu la meilleure excuse pour ne plus aller sur le Centaurus et pour réduire ses risques d'exposition. Mais depuis que la situation s'était calmée, et plus encore depuis les élections, elle ne trouvait plus d'excuse... Il lui fallait retourner sur le Centaurus, faire semblant d'être Elisabeth, faire semblant d'être une astrophysicienne et travailler sur un projet auquel elle ne comprenait rien... La situation sentait le roussi.

Et il fallait dire que même sans compter le risque de se faire démasquer si quelqu'un s'aperçevait qu'elle passait la journée à taper dans le vide, il y avait quelque chose de plus inquiétant encore. Elle savait que son frère avait embarqué. Elle n'en avait pas douté, il aurait coute que coute réussit à obtenir une place. Mais non seulement il était dans la flotte mais en plus il venait d'être élu conseiller des habitants inférieurs. Et elle craignait qu'il finisse par la démasquer.
Cela mettait Charlie dans une rage folle. Elle qui avait pensé que vivre ses derniers instants sur Terre l'aiderait à se reconnecter avec son frère elle se retrouvait aujourd'hui à le détester peut-être encore plus. Parce qu'il était vivant, bien installé au chaud dans des appartements sans doute loin de la crasse et l'entassement où elle comme la majorité de la flotte vivait. Il était surement là grace à ses magouilles, ses relations, et elle ne doutait pas que sa place de conseiller relevait de ces mêmes choses. Il était vivant alors qu'Elisabeth était morte. Et Charlie ne l'acceptait pas. Depuis le décollage, pas une seule fois il n'avait cherché à prendre contact avec Elisabeth, et Charlie n'arrivait pas à croire à quel point il devait être égoiste. Qu'il ne cherche pas à savoir si Charlie avait embarqué ne l'aurait pas choqué, mais Elisabeth avait tout fait pour maintenir la famille ensemble, et pour au final être traitée pas bien mieux qu'elle...

Elle venait d'arriver sur le Centaurus quelques minutes auparavant, et pourtant elle fut interceptée dès son arrivée dans "son" bureau par un homme qui semblait l'attendre et la guetter. Charlie sentit la sueur couler dans son dos, tachant de ne rien laisser paraître. Etait-il là pour exposer la jeune femme qui avait embarqué à la place de sa soeur et se faisait encore passer pour elle ? Quelqu'un avait-il finit par vendre la mèche ? Si ce n'était pas ça, elle ne se trahirait pas en discutant, et acquiesçant, elle suivit l'homme. Après tout, il n'avait rien d'un soldat peut-être cela n'aurait rien à voir...

Charlie lui emboita le pas, anxieuse comme jamais jusqu'à ce qu'il ouvre la porte d'une petite salle. En voyant son frère, elle ne se sentit aucunement rassurée. Il la reconnaitrait immédiatement, elle pouvait tromper des collègues qui ne connaissaient Eli que de loin, mais pas son propre frère. Bien sûr, cela ne voulait pas dire qu'elle était démasquée, comment aurait-il su après tout ? Charlie savait qu'elle aurait du lui parler d'Eli mais... La vérité c'était qu'elle n'en avait pas la force. Les relations avec son frère s'étaient trop dégradées au fil des ans, et finalement Charlie n'avait plus l'impression de partager quoi que ce soit avec lui. Hormis Eli. Elle avait été le dernier lien entre eux... Et à vrai dire, sans elle Charlie ne savait plus quoi faire avec son frère. Qu'allait être sa réaction ? Après tout, ils avaient finis par se détester, et si une des soeur devait survivre, aucun doute qu'Alexander aurait choisit Elisabeth. Et il se retrouvait dorénavant avec la mauvaise soeur.

Lorsqu'elle prit le temps de regarder son frère, elle se rendit compte... Pourquoi cette attitude, que se passait-il ? Croyait-il.... N'avait-il pas... Oui, il pensait se trouver en face d'Eli, sans aucun doute. Charlie allait devoir faire quelque chose qu'elle redoutait profondément, et apprendre à son frère que celle qui avait survécu était la mauvaise soeur... Comment réagirait-il ? Elle se doutait qu'il ne serait pas heureux. Si pendant un temps elle avait pensé que le décès d'Eli allait peut-être les rapprocher, elle ne se berçait pas d'illusions. Et de toute façon, tout comme elle ne voulait pas avoir affaire à lui avant la catastrophe, il n'avait pas changé. Il avait même réussit à profiter de la situation pour se faire élire conseiller des habitants inférieurs. Quelle blague. Que savait-il des conditions dans lesquelles ils vivaient ? Qu'il ait acheté des voix ne l'aurait aucunement surpris d'ailleurs, cela allait parfaitement avec l'image que Charlie s'en faisait. Mais elle devait avouer qu'elle n'aurait pas refusé un peu d'aide de son frère. Elle était cooincée dans le rôle de sa soeur, et elle sentait qu'elle finirait bien vite par être rattrapée. Même si Nür la couvrait, quelqu'un finirait bien par s'apercevoir que son travail n'avançait pas du tout.

Son frère prit alors la parole, semblant effondré, fuyant son regard, ne la reconnaissant visiblement pas. Sa voix tremblait malgré la retenue dont il semblait faire preuve et que Charlie pouvait deviner.

- Me dire quoi, Alexander ?

Charlie décida sciemment de ne pas se dévoiler immédiatement, curieuse. Qu'allait-il annoncer à Elisabeth ? Il n'avait même pas pris la peine de venir la consoler quand suite à l'embarquement il fut évident que Charlie n'avait pas embarqué, était-ce cela qu'il venait annoncer ? Pas après des semaines, et surement pas dans cet état, à moins qu'il n'ait enfin trouvé un peu d'humanité cachée dans un recoin sombre de son esprit corrompu ? Charlie n'était pas tendre avec son frère, mais après tout il le méritait bien. Même si elle pouvait aujourd'hui accepter qu'il n'ait pas été directement responsable de la mort de leurs parents, sa conduite n'était et n'avait jamais été exemplaire. Se dévouer à son travail, Charlie connaissait. En faisant souffrir sa famille par son absence, en étant incapable d'apprécier la chance qu'il avait d'avoir LUI une famille, et tout ça pour quoi, pour une carrière au milieu de requins qui avaient déteints sur lui et qui devait chaque jour le pousser à écraser des gens pour s'élever ? Non, cela Charlie ne pouvait ni le comprendre ni le cautionner.

La jeune femme resta à la porte, immobile et lui demanda de préciser ce qu'il voulait dire. Alexander se figea un instant. Cette voix était différente de celle d'Elizabeth. Était-ce l'émotion, la situation, le temps passé, qui l'avait changé ? Il releva instinctivement la tête et là ce fut clair : ce n'était pas du tout Elizabeth qu'il avait en face de lui. Ce visage, c'était celui de Charlie. Perdait-il la tête ? Pendant un instant il se demanda si son esprit n'avait pas juxtaposé les traits de son emmerdeuse de petite sœur sur ceux de Lili. Mais non, la personne qu'il avait en face de lui était bien Charlotte. Malgré les années à seulement se croiser furtivement, sans s'adresser la parole, il reconnaissait bel et bien sa sœur. Et puis, qui mieux que lui pouvait arriver à différencier ses sœurs ? Il y en avait bien dehors qui n'arrivait même pas à différencier deux asiatiques qui n'étaient même pas de la même famille... Mais lui, arrivait clairement à voir les différences qui lui semblaient énormes. Ou alors était-ce un quelconque attachement qui parlait pour lui ? Le temps et la haine avaient pu altérer sa perception pour ses cadettes. L'un plus agréable et sympathique que l'autre. Son esprit, son instinct lui jouait des tours. L'incompréhension se mua en colère sourde. Ne pas comprendre le rendait fou. Il aurait voulu hurlé pour avoir une explication claire et immédiate. Mais sa personnalité réservée et calme arriva à maintenir la bête au fond de son estomac. Dans un coin de sa tête, il se demanda ce qu'elles avaient fait... Ce qui était arrivé. Etait-ce un mauvais signe ? Avaient-elles commit l'irréparable et il aurait, ainsi, entant que conseiller, à réparer les pots cassés ? Il en était presque las d'avance de devoir encore se plier en quatre pour rattraper les bourdes de sa famille...


Pourquoi avait-il toujours à tout réparer et à protéger tout le monde à la fin ? Et aussi, pourquoi tout le monde était si ingrat ? Son fils, d'ailleurs, ne semblait pas redevable d'avoir une cabine plus que confortable dans un endroit où on ne manquait pas de se faire égorger à chaque coin de rue... Et maintenant Charlie et Elizabeth qui lui cachait leurs petites magouilles, totalement inconscientes du fait que leurs actions pourraient lui coûter sa place. Il se redressa d'un coup, les yeux à moitié entre l’incompréhension et la colère. Il fit un pas en avant et contourna Charlie pour refermer la porte violemment. Il resta ainsi, la main sur la poignée, dos à Charlotte. Silencieux. Son cerveau tournait à mille à l'heure. Même si il avait eu une grande imagination il n'aurait jamais cru que ceci était possible. Que ce passait-il ? Elizabeth avait-elle caché Charlie ? Et dans ces cas là, pourquoi ne le lui avait-elle pas dit ? Il eu l'impression de perde totalement la tête et de ne plus savoir où il était. Il se retourna, toujours incapable de dire quoi que ce soit et considéra encore un instant Charlie. Non c'était bien elle. « Tu es avec Elizabeth ? » Il n'y avait pas d'autres explications... A moins que... Pourquoi ce type lui avait amené Charlotte alors qu'il avait demandé son autre sœur ? Où était-elle le jour du départ ? Comment avait-elle embarqué ? Quels billets ? Est-ce que Elizabeth avait réussit à lui procurer des tickets ? Il demanda ensuite « Tu étais sur le Pegasus, avec elle pendant tout ce temps ? Et me dire que tu étais déjà à bord, au lieu de me laisser en plan devant la navette ! Ca t'est pas venu à l'esprit ? » Son ton avait grimpé d'un cran. Il était sur les nerfs et en même temps il était presque soulagé de ne pas devoir annoncé de nouvelles macabres et de passer, encore une fois, pour le méchant de l'affaire...

Charlie & Alexander
le temps de respirer

Charlie vit l'incompréhension dans les yeux de son frère, les mille et unes questions qui défilèrent alors qu'il ne lui fallut pas plus de quelques secondes pour réaliser qu'elle n'était pas Elizabeth. Elle aurait espéré tenir sa couverture plus longtemps. Serait-elle celle qui lui apporterait la désastreuse nouvelle ? En était-elle seulement capable ? Eli était la seule chose qui les avait maintenu relié, tant bien que mal. Plutôt mal que bien.
Quand il demanda si elle était avec Elisabeth, son coeur se serra dans sa poitrine. Elle fut incapable de répondre, son regard délibérément evitant le sien, les bras croisés sur sa poitrine. Elle était presque prête à faire le premier pas, et lorsqu'elle croisa enfin son regard, elle était presque résolue. Elle allait lui dire, elle allait tout lui dire, le mettre dans le secret, lui raconter tout, le suicide déguisé d'Eli, le secret qu'elle n'avait eu le temps de lui confier, et lui demander de l'aide pour retrouver les meurtriers de sa soeur. Mais quand il haussa le ton, toute sa bonne volonté disparut. Elle ne voyait plus que le requin, ce frère qui avait tout renié, qui avait été la cause du décès de ses parents. Celui qui avait rendu sa vie plus misérable encore, et qui osait hausser le ton, lui faisant des reproches sans queue ni tête, le frère qui avait embarqué sans un regard en arrière. S'attendait-il à ce qu'elle vienne le supplier de la faire embarquer ? Il avait eu tort, et elle ne voulait rien avoir à faire avec lui. Elle avait été folle de penser que de perdre Elisabeth pourrait les rapprocher, et elle se fichait bien de lui.


- De quoi tu parles, Alex ? Comment veux-tu que je te laisse en plan ?! J'avais aucune idée d'où tu étais et visiblement ça ne t'a pas troublé non plus. Il t'a fallut tout se temps pour venir prendre des nouvelles de ta soeur, s'assurer qu'elle allait bien... Quand allais-tu lui dire que j'étais morte Alex ?! Quand tu te serai suffisamment servit d'elle ?! Lui aurais-tu menti pour couvrir que tu n'avais rien à foutre de ma survie ou pas ?!

Sa colère explosa, il montait le ton, il OSAIT monter le ton avec elle ? Des années qu'ils n'avaient plus rien à se dire et il osait lui faire des reproches qu'elle ne comprenait même pas ! De toute façon, elle était incapable de l'écouter, sa colère était bien trop grande, et c'est sur un  ton encore au dessus, plein de colère et de ressentiment qu'elle continua, annonçant la nouvelle qui lui brisait le coeur. Briserait-elle aussi celui d'Alex, elle en doutait. Après tout, il n'avait pas cherché à la contacter avant aujourd'hui, il se fichait bien d'elle visiblement.

- Elisabeth n'est pas montée à bord ! Tu te retrouve avec la mauvaise soeur, Alex et j'en suis désolée pour toi !

Son ton chuta soudainement. Les larmes lui montèrent aux yeux sans qu'elle atténuent la colère froide et sourde qui s'était emparée d'elle. Elle les avait retenues, les réservant pour le moment où elle aurait enfin le droit, une fois qu'Elisabeth aurait eu sa justice. Une fois que Charlie aurait retrouvé les responsables et les aurait fait payer, quitte à y laisser sa vie. Elle était restée terriblement froide, parce qu'elle ne pouvait pas se permettre de se lamenter, pas encore. Mais devant son frère, tous ses sentiments refluèrent à la surface. C'était sa dernière famille, et elle savait qu'il aurait tout donné pour que leurs places aient été échangées. Tout comme elle aurait préféré perdre Alexander qu'Eli, tout aussi horrible que ce fut. Comment aurait-elle réagit s'il était resté sur Terre ? Aurait-elle été aussi détaché ? Aurait-elle mis si longtemps à s'enquérir du chagrin de sa soeur ? Non. Mais les liens qu'elle avait avec Eli ne pouvaient être comparés à quel autre que ce soit.
Et en même temps, que devait-elle attendre de ce frère qui devenait de plus en plus un étranger, avait faillit à ses yeux et suivait le chemin qu'elle dénoncait et rejetait ?